En réalité, le Platform Ops est différent. Il cimente toutes les organisations et tous les cas d’utilisation nécessaires pour concevoir des applications dans le cloud.
Une plateforme est un ensemble de technologies utilisées par différentes équipes d’ingénieurs pour exécuter diverses fonctions qui reposent toutes sur la puissance de calcul. Une équipe d’applications Web s’appuie sur des serveurs Web, un middleware (comme Node.js), un front-end et des équilibreurs de charge. Une équipe qui gère la technologie marketing s’appuie sur des produits SaaS comme Adobe Creative Cloud et Salesforce. Une équipe chargée des opérations réseau s’appuie sur Kubernetes, des ADC (Application Delivery Controller) et des solutions de réseau virtuel (Kubernetes joue aussi un rôle important ici). À l’ère du cloud computing et des applications natives, toutes les équipes s’appuient sur une plateforme qui fournit non seulement les capacités de base en matière de calcul, de stockage et de mise en réseau, mais aussi les outils nécessaires à la création et à la mise en œuvre des applications.
Platform Ops est l’équipe responsable de la conservation, de la maintenance, de la connexion et de la sécurisation de la plateforme qui fournit aux équipes DevOps ce dont elles ont besoin pour faire leur travail. Étant donné le nombre croissant de technologies opérant leur transition vers le cloud, l’approche Platform Ops est également étroitement impliquée dans la fourniture de fonctionnalités de base telles que la mise en réseau et la sécurité à l’échelle de l’entreprise.
L’univers des applications a connu des transformations radicales au cours de la dernière décennie. Les applications monolithiques sont transformées en services connectés par des API. Les applications distribuées peuvent non seulement intégrer plusieurs services, mais aussi s’étendre sur plusieurs clouds. Les développeurs sont devenus les maîtres de leurs piles technologiques, ils ont les pleins pouvoirs pour le choix des outils. Dans certaines entreprises, les directeurs IT font le constat suivant : alors qu’ils comptent plusieurs dizaines d’équipes DevOps, leur entreprise utilise en réalité plusieurs centaines, voire milliers, d’outils et de solutions différents pour le calcul, les données, les files d’attente de messages, l’observabilité, la sécurité et les réseaux. Cela se vérifie en particulier au niveau de la couche application (couche 7). Par exemple, l’une des plus grandes entreprises d’applications mobiles nous a confié qu’elle exécutait plusieurs clusters Kubernetes et différents types de maillages de services, parce que ses équipes d’applications utilisent un très grand nombre d’outils et de solutions incompatibles ou ne pouvant pas être pris en charge sur une seule plateforme.
La stratégie Platform Ops est une solution prometteuse à cette hyper-prolifération d’outils technologiques qui pèse aujourd’hui sur les entreprises. L’équipe Platform Ops collabore avec tous les utilisateurs de solutions informatiques et d’applications de l’entreprise, leur demande ce qu’ils veulent et ce dont ils ont besoin, puis réduit les demandes à un ensemble de choix plus restreint. Au fond, Platform Ops vise à trouver un équilibre sain entre le choix et le chaos ; l’objectif est de permettre aux entreprises d’effectuer un "virage à gauche de la sécurité" (connu sous le nom de shift-left) tout en maintenant une sécurité, une gouvernance et une fiabilité solides.
Certes, certaines entreprises offrent encore aux équipes chargées des applications ou DevOps la possibilité de choisir leurs propres outils, lesquels ne sont pas nécessairement pris en charge par Platform Ops. Netflix est ainsi connu pour autoriser des sélections d’outils en dehors de son portefeuille d’outils technologiques géré. La condition est que les équipes qui optent pour des applications non gérées par le groupe doivent prendre en charge leurs propres outils sans l’aide des équipes Platform Ops, du service IT ou d’autres équipes DevOps.
Il est important de noter que Platform Ops n’est pas synonyme de consolidation informatique. Alors que la consolidation informatique a tendance à être une approche lourde et descendante, Platform Ops est une approche consultative et ascendante. Les équipes Platform Ops doivent convaincre et former les utilisateurs afin de s’assurer que tous comprennent pourquoi les choix ont été faits et comment tirer le meilleur parti des solutions proposées sur la plateforme.
Les équipes Platform Ops sont généralement issues des rangs du développement d’applications et du DevOps, et comprennent donc mieux que quiconque les besoins et les souhaits de ces équipes. En outre, les équipes Platform Ops continuent généralement d’écrire du code, soit pour des outils internes, soit à des fins de configuration et de gestion, et finissent donc par utiliser la plateforme qu’elles gèrent. Cela diffère de la pratique habituelle des équipes informatiques, qui consiste à dicter des solutions mais pas à les utiliser dans le cadre de son propre travail.
Pour les entreprises qui essaient de se repérer au mieux dans l’environnement nouveau et déroutant du cloud, des applications natives du cloud, de l’infrastructure distribuée et du virage à gauche opéré dans le développement et la sécurité des applications, l’équipe Platform Ops constitue une source cruciale de renseignements et d’évaluation. Elle aide non seulement le directeur IT, mais aussi le directeur financier et les équipes chargées des achats et de l’audit, à comprendre ce qui est nécessaire et ce que cela peut engendrer comme coûts. À cet égard, Platform Ops peut être vu comme un courtier neutre qui devient un canal crucial pour le partage d’informations et de connaissances institutionnelles.
La réalité est qu’il existe toujours une tension entre choix et contrôle. Mais aujourd’hui, les entreprises doivent s’efforcer de devenir des lieux attrayants pour les développeurs qui y travaillent et créent des applications. Si les développeurs se voient imposer des limites trop strictes, la frustration qui en découle les incitera à chercher un emploi ailleurs. D’un autre côté, offrir trop de choix aboutit à un environnement technologique distribué semblable à une vraie tour de Babel, où cohabitent un méli-mélo d’outils incompatibles, configurés et structurés de manière incohérente. Au fil du temps, un tel environnement devient non seulement ingérable mais aussi peu sûr. La façon dont les équipes Platform Ops parviennent à équilibrer ces préoccupations sera déterminante pour l’avenir de l’entreprise dans la transformation numérique et dans l’univers des applications natives du cloud et largement distribuées. Toute la question sera de savoir où fixer le curseur entre permissivité et contrainte.