Dans le monde de la cybersécurité, les centres opérationnels de sécurité (SOC) sont constamment sous pression. La surveillance continue, l’analyse des menaces et la réponse aux incidents sont autant de tâches critiques que les analystes doivent mener à bien pour protéger les infrastructures informatiques des entreprises. Cependant, un défi majeur persiste : l’alert fatigue. Selon "The State of Pentesting 2022", 83 % des équipes de sécurité luttent contre le volume des alertes. En conséquence, 55 % des analystes SOC déclarent manquer des alertes critiques (2022 Cloud Security Alert Fatigue Report), et il faut en moyenne 90 minutes pour enquêter manuellement sur une seule alerte.
La fatigue des alertes, ou "alert fatigue", se produit lorsque les analystes sont submergés par le volume considérable d’alertes de sécurité, souvent en grande majorité des faux positifs. Cela conduit non seulement à une diminution de la vigilance, mais aussi à des erreurs humaines coûteuses, laissant passer des menaces réelles. Traditionnellement, les solutions comme les playbooks de SOAR (Security Orchestration, Automation, and Response) ont été utilisées pour automatiser certaines tâches. Toutefois, la mise en place et la maintenance de ces playbooks restent très manuelles, chronophages et difficiles à gérer. Dans ce contexte, l’intelligence artificielle (IA) émerge comme une solution révolutionnaire pour transformer les SOC et surmonter ce défi.
Les playbooks SOAR ont beaucoup apporté aux opérations de cybersécurité, en particulier pour les équipes disposant des ressources nécessaires pour les construire et les maintenir. Ils automatisent les tâches de routine et intègrent les connaissances des membres expérimentés dans des flux de travail, ce qui multiplie leurs effets. Cependant, la complexité peut rapidement devenir incontrôlable, même avec une interface conviviale, et nécessite souvent des ingénieurs d’automatisation dédiés pour prédire les types de workflows à automatiser, puis construire et maintenir les playbooks. Cette complexité et ces coûts sont exacerbés à mesure que le volume des alertes augmente, rendant les playbooks difficiles à maintenir et chronophages. L’IA offre des capacités exceptionnelles pour analyser des volumes massifs de données en temps réel, repérer les modèles et automatiser les processus. Voici comment elle révolutionne les SOC :
1. Réduction des faux positifs : Grâce à l’apprentissage automatique, les systèmes IA peuvent être entraînés à différencier les activités bénignes des véritables menaces. En s’appuyant sur des ensembles de données historiques et des techniques avancées de machine learning, les solutions IA réduisent considérablement le nombre de faux positifs, permettant aux analystes de se concentrer sur les alertes les plus critiques.
2. Priorisation des menaces : L’IA est capable de hiérarchiser les menaces en fonction de leur gravité et de leur potentiel d’impact. En évaluant divers facteurs tels que le comportement de l’attaquant, les vulnérabilités exploitables et le contexte opérationnel, les systèmes IA fournissent une évaluation plus précise des risques, aidant les SOC à allouer efficacement leurs ressources.
3. Automatisation des réponses : Les technologies d’IA permettent d’automatiser certaines réponses aux incidents. Par exemple, des actions correctives telles que l’isolement d’un système compromis ou la fermeture de ports vulnérables peuvent être exécutées automatiquement, réduisant ainsi le temps de réaction et limitant les dégâts potentiels.
4. Analyse prédictive : L’IA ne se contente pas de réagir aux menaces existantes, elle peut également prédire les futures attaques en identifiant des schémas et des tendances dans les données. Cette capacité de prévision permet aux SOC d’adopter une posture proactive plutôt que réactive, anticipant et neutralisant les menaces avant qu’elles ne se concrétisent.
Une innovation majeure dans ce domaine est l’utilisation d’agents autonomes pour l’investigation des alertes de cybersécurité. Contrairement aux solutions traditionnelles qui se concentrent principalement sur la détection, ces agents autonomes se spécialisent dans l’investigation approfondie des alertes. Les avantages de cette approche sont multiples :
Minimisation du MTTR (Mean Time To Remediate) : Les agents autonomes, étant des IA, traitent les alertes immédiatement après leur réception et les investiguent en moins de cinq minutes.
Filtrage des alertes malveillantes : À travers des investigations profondes, ils filtrent les alertes vraiment malveillantes, permettant ainsi aux analystes de se concentrer sur les véritables problèmes.
Réduction du travail manuel : Cette solution réduit drastiquement le travail manuel et répétitif des analystes, leur permettant de se concentrer sur des décisions stratégiques.
Maximisation du ROI des outils SOC : Les IA s’intègrent à tous les outils existants et utilisent le maximum d’entre eux pour effectuer leurs investigations, optimisant ainsi l’utilisation des ressources disponibles.
Et tout cela, de manière autonome, sans qu’un analyste expérimenté ne doive mettre en place un playbook. Les bénéfices sont donc obtenus à grande échelle, sans les coûts et la complexité associés aux méthodes traditionnelles.
Il est crucial de comprendre que l’IA ne vise pas à remplacer les analystes humains, mais à les assister. En automatisant les tâches répétitives et en fournissant des analyses précises et en temps réel, l’IA permet aux analystes de se concentrer sur des tâches à plus haute valeur ajoutée, telles que l’investigation approfondie et la stratégie de défense.
Je crois fermement en cette synergie entre l’humain et la machine. En effet, enrichir les capacités des SOC, en intégrant des technologies IA de pointe qui réduisent la fatigue des alertes et améliorent l’efficacité opérationnelle est essentiel.
Alors que les cybermenaces continuent d’évoluer en complexité et en sophistication, l’adoption de l’IA dans les SOC n’est plus une option, mais une nécessité. La fatigue des alertes ne doit plus être un obstacle à une cybersécurité efficace. En tirant parti de l’IA, les entreprises peuvent non seulement renforcer leur défense contre les cyberattaques, mais aussi créer un environnement de travail plus sain et plus productif pour leurs analystes.
L’avenir de la cybersécurité réside dans cette collaboration harmonieuse entre l’intelligence humaine et artificielle. Ensemble, nous pouvons construire des SOC plus résilients, capables de faire face aux défis de demain.