L’objectif principal de cet événement fut d’apporter des propositions concernant le rôle des politiques publiques pour accélérer la transformation numérique dans ce monde à double vitesse : d’une part, le numérique s’impose de plus en plus dans notre société, d’autre part, il tend à inquiéter les citoyens et politiques. Dans ce but, Hervé Morin et Alain Dolium accueillaient, dans l’amphithéâtre Lamartine, différents acteurs majeurs du secteur numérique, en vue de débattre de leurs perspectives.
Deux tables rondes ont constitué le cadre des débats à travers une approche « bottom up », l’enjeu étant d’approcher la thématique avec l’ensemble des acteurs de la société. La réflexion part d’un constat paradoxal : alors que le numérique est un sujet structurant pour le devenir du pays dans le sens où une majorité de secteurs d’activité font objet de transformation digitale, c’est une thématique qui est relativement oubliée au sein de la sphère publique.
La première table ronde était centrée sur l’impact de la transformation digitale sur la compétitivité et les emplois. La seconde a mis l’accent sur les conséquences de l’essor du numérique sur la vie de la cité et les pratiques démocratiques.
Le point de départ de ces débats fut de considérer l’importance du secteur numérique en France autour de données symboliques : aujourd’hui, près de 80% de la population française est connectée, l’audience est alors importante. Mais la numérisation des entreprises n’est pas totalement assurée. Or, à horizon 2050, 42% des emplois seront concernés par l’autonomisation due par la transformation digitale. Ainsi, les acteurs de ce domaine préconisent de se tourner vers l’Afrique, un continent connecté (70% des transactions mondiales sont faites en Afrique). Ils appellent ça « l’innovation inversée » (Mohamadou Diallo), l’Afrique est porteur pour identifier les pratiques liées au numérique.
A la suite de la remise en question d’une vision autocentrée, Jean Noël de Galzain a mis en évidence l’avancée française en la matière, principalement via le Crédit d’Impôt Recherche qui a pour objectif de former les individus aux nouvelles difficultés en rapport au numérique. Les entreprises parviennent alors à rester compétitives. Cependant, cela n’est pas sans oublier l’obstacle premier pour les entrepreneurs qui est le financement de l’innovation (Steny Solitude). Ce problème est la conséquence d’une culture française (Joël Dreyfus) avec une économie fondée sur un capitalisme patrimonial tangible alors que la dématérialisation pose des difficultés de considération pour ceux qui financent.
Enfin, le débat s’est concentré sur l’angle humain, sur la cohésion sociale au-delà de l’emploi ou de l’innovation. Patrick Gagnaire insistait sur l’importance pour le monde politique d’accompagner les individus face à ces transformations. Rost mettait en évidence la promesse de désenclavement des « quartiers populaires » grâce aux technologies. Cependant, ce domaine permet à chacun d’accéder à l’information ce qui est à la base de la démocratie. Guillaume Weill appuyait la possibilité de faire évoluer la démocratie représentative qui « a du plomb dans l’aile » (Hervé Morin), afin d’impliquer davantage les citoyens dans la vie de la cité. Finalement, un constat commun a émergé durant ces discussions, il est du ressort des autorités politiques de travailler sur l’image d’une co-construction grâce au numérique avec la mise en place d’une démocratie citoyenne-participative.
En guise de conclusion, Hervé Morin considérait que chaque projet devait être soutenu et financé afin de faire de la création d’entreprise une priorité nationale. Il a résumé deux idées principales qui ont émergées grâce au colloque qui peuvent être creusées à l’échelle des territoires :
1- L’économie numérique va bouleverser notre rapport au monde et au quotidien avec notamment les problèmes liés aux emplois qui disparaissent. Cependant, elle sera source de travail et de dynamisme permettant le rayonnement de la France. Finalement, le numérique est l’outil de demain et doit être utilisé pour améliorer la vie des citoyens et non la rendre plus difficile.
2- La démocratie participative est à questionner au plus vite. La rapidité de l’évolution du numérique interpelle sur le temps législatif, le big data, bien qu’il effraie, permet aux citoyens de se renseigner en un temps record sur n’importe quel sujet. Le numérique est-il source de démocratie participative ?